Jeudi 24 novembre 2022,10H00.
Nous, classe de 1eG07, avons rendez-vous avec Sylvain Pattieu, romancier et historien.
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Quelques questions posées par Maéva, Lucile, Alya à Sylvain Pattieu pour Radio Hérisson.
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Aix-Paris-Gardanne
L’auteur a pris le TGV très tôt ce jeudi pour revenir dans sa région natale et parler avec nous de son livre "Et que celui qui a soif vienne". Nous l’avions lu durant les vacances de la Toussaint et nous sommes maintenant en train de lire « Manon Lescaut ». Le professeur de français nous avait attribué à chacun un personnage et nous avions pour consigne d’écrire une lettre à l’auteur au nom de ce personnage. Au début, nous ne savions pas que ces lettres seraient réellement envoyées à Sylvain Pattieu. Il les a lues et il est venu.
Une rencontre drôle et mémorable, Anissa R
Une rencontre chaleureuse et enrichissante, Maïssa B
Sylvain Pattieu nous a parlé de lui. Venir à Gardanne, pour lui, c’est un peu retour en enfance : il était lui au lycée à Vauvenargues puis il a fait une khâgne au lycée Cézanne. Il se sentait déjà à cette époque attiré par les pratiques artistiques mais il s’est vite rendu compte que la peinture, la danse ou le dessin n’étaient pas pour lui et il a arrêté de faire des tags près du lycée Zola. C’est l’écriture qui a été pour lui le moyen d’exprimer ses sentiments mais aussi d’en éprouver.
Une intervention intéressante dans le cadre d’un lycée ? J’étais dubitatif. Mais ce fut captivant ! Yoan B.
Merci, Sylvain Pattieu, d’avoir fait le déplacement et d’avoir passé un moment avec nous. Chaimae B
Un roman d’évasion
Sylvain Pattieu nous a confié qu’avant de se mettre à ce roman, il voulait écrire sur tout autre chose : sur la mort de sa mère qui avait souffert d’une longue maladie neuro-dégénérative. Mais il n’y parvenait pas. Alors il a voulu partir, s’évader dans complètement autre chose : les pirates, les Caraïbes, les bagarres à l’épée et les trésors.
A la découverte des mécanismes de l’écriture. Aux sources de l’inspiration romanesque. Raphael JC
Dans les coulisses de l’écriture. Rayane H
C’est ainsi qu’est né ce roman de pirates : un désir d’évasion. Partir loin, très loin, dans les Caraïbes.
"Et que celui qui a soif vienne" est un roman plein de fantaisie, les courts chapitres donnent du suspense, l’action est partout : batailles , bagarres , scènes de torture et d’amour. Carla B
Mais au fil de l’écriture, pour inventer certains personnages, Sylvain a puisé dans ses souvenirs personnels et il a fait réapparaitre certains de ses proches disparus à travers la fiction comme son oncle Bicou de Marseille devenu Ferracciolo, prêtre, pirate et grand orateur.
Je n’avais pas éprouvé de réelles émotions avec "Et que celui qui a soif vienne" mais je le vois autrement maintenant, comme une histoire davantage émouvante parce que nourrie de personnes réelles. Alicia G
Un roman nourri d’autres romans
Pour écrire Et que celui qui a soif vienne, Sylvain Pattieu a voulu reprendre tous les éléments traditionnels des romans et des films de pirates comme Moonfleet ou L’île au trésor : passer à la planche, amasser des trésors, découvrir une île déserte. Il aime la grande liberté du roman d’aventures et la grande liberté qu’incarnent les pirates. Mais dans ce livre, il a voulu aussi donner de la place au romantisme, au sentiment. En arrivant en khâgne, Pattieu s’était aperçu qu’il connaissait mal la « grande » littérature classique et que ses goûts le portaient plutôt vers des livres « non-légitimes ». En écrivant un roman d’aventures, il cultive encore ce goût.
Avec Sylvain Pattieu, découvrez une autre Manon Lescaut. Nella L
Le titre « Et que celui qui a soif vienne », est une citation de la Bible : « celui qui a soif », c’est le lecteur qui aurait envie d’aventures, « qu’il vienne », c’est l’invitation que lui lance Sylvain Pattieu pour découvrir les pirates, les esclaves libérés et leurs ennemis.
Grâce à son roman, Sylvain Pattieu donne une chance à Manon d’échapper à son destin tragique et de vivre libre. Louison R
Mais c’est surtout Manon Lescaut dont nous avons parlé parce que c’est l’autre roman que nous lisons pour le bac. Sylvain Pattieu avait découvert ce roman pendant ses études et il l’avait abordé de manière très féministe : pour lui, Manon est une femme qui cherche la liberté et des Grieux est celui qui l’entrave, celui qui veut créer de l’emprise. Il pense que des Grieux raconte l’histoire de la manière qui l’arrange et conformément aux valeurs misogynes de son époque. Pattieu pense que Manon n’avait pas véritablement d’autres choix dans la société du XVIIIème siècle que de vivre de la générosité des hommes qu’elle séduisait.
Je ne suis pas d’accord avec Sylvain, pour moi, Manon se moque de des Grieux et joue avec ses sentiments. Mais c’est vrai, chacun peut avoir son interprétation du livre. Lény R
La plupart d’entre nous n’avons pas du tout ce point de vue : pour nous c’est Manon qui mène Des Grieux par le bout du nez, une fille de joie dangereuse pour un jeune garçon trop sentimental. Sylvain nous a montré que l’on peut avoir différentes lectures d’un même livre. En tout cas, lui, il voulait sauver Manon. Donc il l’a reprise et il a changé son destin : il lui a donné la liberté dont elle rêvait peut-être et il l’a changée en pirate, symbole possible de la liberté. Il imagine même qu’elle se venge en tuant Des Grieux d’un coup d’épée. Mais pour l’imaginer, il s’est éloigné du roman de l’abbé Prévost et des Grieux est devenu Barral, un "gros lourd", tandis que Manon reste Manon.
Notre perception de l’histoire peut varier, nous sommes libres de l’imaginer come l’auteur est libre de la créer, c’est ce que j’ai retenu de la rencontre. Illian
Romancier et historien
Pour créer le personnage du beau Jacques Louis, Sylvain Pattieu s’est inspiré de l’autobiographie de Jacques-Louis Ménetra, un ouvrier vitrier du XVIIIème siècle, qu’il connaissait en tant qu’historien. On retrouve aussi dans son roman l’histoire de la traite négrière et du commerce transatlantique au XVIIIème siècle.
Malgré un bac scientifique et après sa khâgne, Sylvain Pattieu a fait effectivement des études d’histoire et il est aujourd’hui professeur d’histoire à l’université de Paris 8 Saint-Denis.
Sylvain Pattieu est un professeur d’histoire qui s’est libéré de l’enfermement de son métier. Lucile F
Il nous a expliqué les différences entre son écriture d’historien et son écriture de romancier même si de plus en plus, il associe les deux comme dans son dernier livre d’historien Panthères et pirates qui raconte l’histoire réelle de deux pirates de l’air américain installés en France, Melvin et Jean Mc Nair. Il nous a lu un passage de ce récit d’historien qui raconte les échanges entre les otages et les preneurs d’otage à bord d’un avion entre Etats-Unis et Algérie : sa source d’historien est constituée par les dossiers du FBI et toutes les paroles écrites sont ainsi vérifiées, mais son montage des échanges est un travail d’écrivain qui cherche à faire vivre l’action.
L’historien écrit pour raconter une vérité. Il doit citer des sources, son écriture a une forme de neutralité même s’il est libre du choix de ses recherches. L’écriture de l’historien se fonde sur la lecture d’archives et quand il raconte un passé proche, la rencontre de témoins directs.
Le roman permet de s’évader dans un monde différent. On tient à des personnages comme à certains amis (ou comme à certains ennemis !). Chiara G
Le romancier au contraire est libre et l’imagination est illimitée. Ecrire un roman, c’est s’immerger totalement dans une histoire inventée et oublier le monde qui nous entoure. En enfilant son costume de romancier, il peut changer le cours de l’histoire, ce qu’il ne peut pas faire en tant qu’historien. Sylvain est d’ailleurs en train d’écrire une uchronie.
Les écrivains ne sont pas si perchés et déconnectés du monde d’aujourd’hui. Gabriel M
Littérature d’adulte et littérature de jeunesse
Sylvain compare souvent l’écriture au sport, et spécialement au football. D’ailleurs, il porte fièrement les couleurs de son équipe, Marseille, dans la ville du 93 où il habite, près du Bondy de M’Bapé. Là-bas, dans sa rue, les guetteurs l’appellent "le Marseillais" ou « Tonton ». La littérature se nourrit de tout : la vie que l’on vit, les romans ou mangas que l’on lit, les films que l’on voit, les jeux videos que l’on joue… et elle s’adresse à tous
Tout le monde peut participer à la discussion et se sentir concerné par le roman. Tout le monde, même les supporters de PSG, c’est donc vraiment un roman très accessible. Numa G
Sylvain Pattieu écrit différentes sortes de romans. Il nous a lu un extrait de son dernier roman-jeunesse, Ecorce vive, le troisième tome de sa trilogie Hypallage dont les héros sont des élèves de première, donc un très bon roman forcément !
J’aime entendre la lecture d’un texte et j’aime le romanesque qui mêle aventures et sentiments. Lucas R
Pattieu s’amuse avec le registre familier et nous a fait rire avec le dialogue de ces adolescents qui nous ressemblent.
Moi aussi, je voudrais écrire des histoires. Maëva C
« Peut-être un futur écrivain est là parmi vous ? », conclut Sylvain. Car oui, la piraterie n’est jamais finie !